La vie, autrement

novembre 2024

Philip et Béatrice ont chacun perdu un enfant en bas âge il y a quelques années. Ils ont accepté de partager comment ils vivent cette blessure, et témoignent en s’appuyant sur leur foi et leur chemin de vie « qu’il y a du fruit à en attendre malgré les pleurs qui ne cesseront pas ».

 

Béatrice, comment vivez-vous le deuil de votre petit Justin ?

Béatrice. Le décès de Justin à 7 ans, qui avait un lourd handicap, a créé pour nous un trou béant. En tant que maman, je le vis comme une amputation d’une partie de moi-même. Aujourd’hui je sens sa présence discrète dans ma vie, celle de notre famille, de nos amis qui parlent souvent de lui. Il est toujours là, mais autrement. Le processus de deuil est long, il y a encore parfois de la colère, de la tristesse. Le vide ne m’empêche plus d’avancer.

 

Et vous Philip celui de Marie-Emmanuelle ?

Philip. Le deuil de ma fille, qui est décédée à 3 ans et demi, a été un gouffre qui a englouti le passé et l’avenir. Avec mon épouse, nous avons été paralysés, jusqu’à ce que la machine à vie reprenne. On reste triste et souffrant mais « pas seulement ». Aujourd’hui, je peux dire que notre fille nous donne aussi une immense force, elle fait grandir notre âme par sa présence, elle nous découvre la puissance de la mort porteuse de la vie. Ma fille m’a ouvert aux autres, elle m’a ouvert un nouveau chemin de vie. La résurrection est déjà là.

 

Comment l’entourage peut-il aider les parents qui perdent un enfant ?

Philip. Il est tellement difficile d’avoir le ton juste et pourtant nous avons reçu énormément de soutien. Par exemple, nous avons trouvé un gâteau sur le pas de notre porte et cela nous a touchés ! Tous les petits gestes d’attention valent parfois bien des paroles.

Béatrice. Les proches sont souvent désemparés ; ils ont peur de dire des mots maladroits et pourtant je les encourage à oser une parole car des mots maladroits dits avec affection font du bien et ne blessent pas. Par exemple j’ai souvent entendu « il faut que tu fasses ton deuil ». Cela n’est pas heureux, mais je savais que l’intention n’était pas mauvaise, aussi j’ai essayé d’accueillir chaque parole de soutien.
Être à l’écoute de ces parents souffrants, avec tendresse et compassion, pour que la paix puisse peu à peu grandir dans leur cœur.
Nous pouvons demander à la communauté chrétienne sa prière si précieuse, qu’elle invoque l’Esprit consolateur.

 

Que conseillez-vous aux parents qui vivent cette épreuve ?

Béatrice. Je les invite à ne pas s’isoler, à accepter le soutien des proches, de la communauté.
Je les encourage à prendre soin des frères et sœurs quand il y en a car c’est aussi un gouffre pour eux et il est important de les accompagner.
Notre foi ne nous a épargnés aucune étape du deuil, la colère, la tristesse, tous ces sentiments nous habitent ou nous ont habités, mais je voudrais insister sur le soutien reçu dans les sacrements. On ne peut imaginer à quel point les sacrements de l’Eucharistie et du pardon sont précieux, ils m’ont soutenu et permis de rebondir. Qu’ils n’hésitent pas à les accueillir.
Peut-être parviendront-ils à faire quelque chose avec cette souffrance ? Je peux témoigner qu’elle m’a rendu plus sensible à celle que vivent tant de personnes malades, elle m’a donné une force pour aller vers eux.
En tant que croyants, posons-nous la question : qu’est-ce que je peux faire de cette épreuve pour vivre ma foi différemment ? Il y a du fruit à attendre malgré les pleurs qui ne cesseront pas…

 

Propos recueillis par l’équipe du Réseau Mondial de Prière du Pape France

 

 

 

 

Partager cet article sur vos réseaux