Une communauté paroissiale accueillante et attentive
février 2025
Hadrien, séminariste, Daniel, curé, et Arnaud, paroissien, témoignent à trois voix de ce qui se vit dans l’Église locale pour accueillir les jeunes séminaristes, leurs désirs, leurs doutes, leur vocation…
Comment cette intention de prière du Pape résonne-t-elle en vous ?
Hadrien, séminariste. Ces mots résonnent avec plusieurs sons qui forment une harmonie, à l’image des fidèles qui forment la paroisse dans laquelle je suis. La communauté ecclésiale accueille mon désir de vie sacerdotale, mais plus encore, elle en est un révélateur à travers le temps passé avec elle. Elle permet de comprendre et de goûter ce qu’est la vie de prêtre, et cela fait naître de nombreuses joies, mais aussi parfois des doutes, vertiges quant à la grandeur de cette charge : être au service des âmes.
Daniel, curé. L’intention de prière du pape François m’interroge. Elle nous invite à développer dans nos communautés une réelle pastorale des vocations. Sommes-nous vraiment force de proposition pour inviter des jeunes à se poser la question : « Quel sens donner à ma vie, suis-je attentif à un éventuel appel du Seigneur ? » Pourra ensuite commencer un réel accueil des questions et doutes des jeunes. Mais la communauté chrétienne en a-t-elle conscience ?
Arnaud, paroissien. Cette intention me pousse à prendre du recul. Il m’était simplement naturel de bien accueillir « nos » séminaristes. Mais en y réfléchissant, je me dis que c’est effectivement en leur qualité de séminariste que je me sens appelé à les inviter.
Hadrien, à qui vous êtes-vous confié lorsque vous avez fait le choix de la vie sacerdotale ?
Bien que cet appel ait résonné très tôt dans mon cœur, je ne l’ai partagé qu’assez tardivement et à très peu de personnes. C’est à 18 ans, au début de ma formation d’ingénieur, que j’ai partagé ce désir pour la première fois à celui qui fut mon curé dans l’adolescence. J’avais entièrement confiance en lui. Après lui, je n’en ai parlé qu’aux prêtres qui m’ont accompagné spirituellement, puis au responsable des vocations, et bien sûr à mon évêque. Quelques personnes qui me connaissaient bien s’en doutaient, mais je ne leur en avais pas parlé explicitement.
Aujourd’hui, mon père spirituel m’est bien sûr d’une grande aide pour avancer sur ce chemin à la suite du Christ. Il est passé par là lui aussi. J’ai la chance également d’avoir de bonnes amitiés avec des prêtres ; je leur livre mes questionnements sur Dieu, sur le prêtre, sur la vie paroissiale, … Et il y a mes amis d’enfance avec qui je peux parler très librement. Certains sont non-croyants et leur point de vue m’aide à relativiser beaucoup de petits problèmes ecclésiaux. Enfin, certains laïcs en paroisse me sont devenus proches. Leur regard m’aide à trouver ma place dans la paroisse et j’essaie de faire mienne leurs aspirations.
Selon vous, comment la communauté ecclésiale peut-elle accompagner les jeunes en discernement ?
Hadrien. Déjà par le simple fait qu’elle existe. Je découvre la communauté et je me pose des questions fondamentales : Suis-je prêt à lui donner ma vie ? Est-ce que je la considère comme ma famille ? Est-ce que j’aime les gens que je rencontre et est-ce que je veux véritablement les servir avec amour ?
Il est précieux que les paroissiens se sentent très libres de dire au séminariste ce qu’ils trouvent de bon chez lui et conforme au prêtre, et ce qui peut être à améliorer, notamment ces personnes avec qui l’on vit des apostolats comme l’aumônerie ou le catéchisme, et qui nous connaissent bien.
Daniel. L’insertion d’un séminariste n’est pas d’abord de l’ordre du faire – mettre en place des activités -, mais de découvrir comment se déploie le ministère dans le quotidien d’un prêtre. La mission d’un curé d’insertion est d’abord l’écoute bienveillante de tout instant. Je dis souvent que mon fauteuil dans le salon du presbytère est une place stratégique qui permet aux séminaristes de s’asseoir, de se poser et de poser les questions.
Le séminaire est un lieu de formation où un savoir est transmis. Il peut y avoir des tensions entre ce qui est reçu et ce qui est vécu sur le terrain. Il est nécessaire d’être à l’écoute pour rassurer et permettre à ces jeunes de vivre une unité de formation.
Si le conflit des générations se vit dans les familles, il peut exister aussi en Église. Un prêtre qui accueille des jeunes en formation doit être capable d’accueillir les étonnements et les interrogations sur des questions théologiques ou liturgiques. Elles peuvent être rudes parfois. L’humour peut aider à avancer pour grandir mutuellement. Revenir à la source qu’est le Christ nous unifie et cette unité se renforce dans la prière commune.
Arnaud. J’essaie de les accueillir le mieux possible. D’abord parce que j’ai un sentiment de reconnaissance pour ces jeunes qui souhaitent consacrer leur vie entièrement au Christ et à son Église. J’ai pris conscience aussi que ce n’est pas évident pour un jeune d’arriver dans une paroisse sans connaître personne, et avec beaucoup de personnes bien plus âgées.
Un exemple concret de sujet ou d’expérience d’accueil ?
Hadrien. Je suis arrivé au moment où mon secteur paroissial s’agrandissait. Un grand évènement a été organisé pour permettre aux paroissiens de bien se connaître. C’était providentiel pour moi ; les paroissiens ont pu me découvrir, et ce temps m’a permis de rencontrer beaucoup de personnes avec lesquelles j’ai pu prendre le temps de partager, manger, jouer au Mölkky, …
Daniel. Le quotidien d’un jeune en formation aujourd’hui est dense. Ces jeunes peuvent être parfois fatigués. Les plages de vie commune faisant place au repos sont très importantes.
Arnaud. Je crois que ces jeunes sont heureux de partager aussi des moments simples, autour d’un jeu de société ou avec un ballon de foot. Je ressens une conviction profonde qui nous rapproche et qui fait que chaque moment partagé est une joie.
Propos recueillis par Maëlle Milan, Réseau Mondial de Prière du Pape France